C'est quoi le marketing du vin?

"Dans le secteur viti-vinicole, vous ne faites pas de marketing". C'est une réflexion que j'entends souvent de la part d'amis, de marketeurs, en start-up ou en grande structure, et d'élèves qui se destine au commerce international du vin.

À force de discussion, je me suis rendu compte que cela dépend, en fait, de ce que l'on entend par marketing. Le "marketing" recouvre aujourd'hui sous un même terme, un nombre important de métiers dont les objectifs et les finalités sont très variés sur un plan opérationnel, dont le spectre s'étend de la direction créative aux data science... Lorsqu'on me demande de définir mon métier de manière concise, ma réponse est toujours la même : "je facilite la rencontre d'une offre et d'un public". C'est une description qui à le mérite d'être simple et qui n'appelle pas un débat sans fin.

Dans une PME ou une ETI du monde du vin, le marketing n’est ni la conception de produit, ni la communication publicitaire, ni la vente, ni la gestion de contenu, ni la promotion commerciale, ni même les 4P, 7P, 5C etc. Pour moi, dans le secteur viti-vinicole, le marketing est une méthodologie de gestion du changement. Elle tire son efficience de la mise en relation de toutes les démarches précédemment citées et c’est une fonction transversale qui s’adosse toujours à l’expérience, la connaissance et l’analyse des marchés offertes par les équipes commerciales. Dans notre monde, le marketing ne crée pas un nouveau besoin ; il est un levier de différenciation et de création de valeur de marque. Or, pour atteindre ces objectifs, nous faisons face à deux obstacles majeurs, notamment dans le secteur particulier des vins fins :

  • la première est la notion de "produit du terroir" qui s'oppose à l'un des principaux dogme des marketeurs, le focus consommateur. Les notions de cahier des charges d'appellation sont ainsi parfaitement antinomiques avec la création d'un produit customer centric. Il est d’ailleurs intéressant de remarquer que les marques de vin à positionnement alternatif, qui ciblent des segments bien spécifiques, avec un positionnement idoine, sont souvent considérées comme ésotériques par les acteurs historiques, même lorsqu'elles connaissent de grands succès.
  • la deuxième est l'atomisation du secteur et la complexité de sa distribution. Le route-to-market est très varié, comme les types et les tailles d'entreprises et de marchés. Cela rend les deux premières briques du process marketing (Connaître, Analyser, Décider, Agir, Mesurer) peu pertinentes. Les panels sont chers et peu instructifs (mis à part sur les entrées de gamme) et les systèmes d'information sont difficilement interconnectables. Sans données consolidées et précises, l'analyse est forcément biaisée et repose souvent sur les seules intuitions relayées par les équipes de vente. Lorsque la pertinence d'une décision ne peut pas être mesurée efficacement, les seules qui seront prises sont celles qui semblent si manifestement gagnantes que les critères accessoires n'ont plus aucune importance. Dans ce contexte, le modèle HiPPO - Highest Paid Person Opinion - est à l'oeuvre, ce qui n'est pas forcément un vecteur de changement.

Selon moi, le marketing du vin c'est la mise en oeuvre des changements nécessaires à la "facilitation" de la rencontre offre-demande et à la valorisation constante de l'image de marque.

C'est une vision certes simpliste, mais puissante, car on la comprend facilement. Les gens détestent ce qu'ils ne comprennent pas...

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